Thématique

Habiter le monde en commun

Ecologie humaine – Architecture et territoires –
Co-habiter avec l’Autre

  • Co-habiter à l’ère de l’Anthropocène : où il est question d’écosystème global, d’ « écoumène » et de « zone critique »

Que l’on parle d’anthropocène, ou de « capitalocène », il est désormais entendu que l’action de l’Homme a des effets dévastateurs sur la planète. Mais ce qui est moins communément admis, c’est que nous faisons partie d’un même écosystème global avec l’ensemble du vivant ; et que préserver la planète, c’est avant tout nous préserver nous-mêmes, êtres humains (la planète s’en sortira de toute façon !). Le géographe Augustin Berque parle d’ « écoumène » pour décrire cette partie du globe façonnée par la présence humaine ; Bruno Latour notamment, propose quant ’à lui la notion de « zone critique », pour évoquer cette fine couche recouvrant la Terre, du sous-sol jusqu’aux premières strates de l’atmosphère, dans laquelle nous évoluons, et dont dépend notre propre survie. Préserver l’habitabilité de la Terre, et apprendre à y cohabiter, tel est l’enjeu central aujourd’hui.

Ce dont il est question, c’est donc de comprendre comment nous sommes liés au Vivant dans son ensemble, de saisir en profondeur que nous dépendons autant de l’équilibre des écosystèmes que ceux-ci dépendent désormais de nous, tant nous les altérons, et tant nous avons en conséquence le devoir de les protéger. L’anthropologie entre ainsi en écologie. Cela paraît comme une idée neuve en occident, alors que cela est déjà ancien dans les autres sociétés, dites traditionnelles, et desquelles l’anthropologie encourage à nous inspirer. L’étude des comportements et des représentations humains ne saurait davantage être tenue à l’écart des questions de biodiversité et de changement climatique, elle se place désormais au centre.

Prométhée s’est égaré… Les progrès technologiques, les flux globaux, les sciences du numérique, le transhumanisme ou encore la colonisation de Mars (aussi fantasque que cela puisse paraître) ne pourront rien contre ce qui est en train de se tramer. La pandémie qui nous bouleverse en ce moment en est une preuve cinglante : d’ailleurs, d’aucuns préfèrent parler de syndémie¹, tant ses liens de causalité sont liés à la perturbation de l’environnement. Il est urgent de comprendre que l’issue est en nous, par nous et pour nous. L’humain s’est aventuré hors de lui-même, le temps est ainsi venu pour lui de revenir à lui-même, dans sa propre « maison ». Et l’anthropologie, en dialogue avec les autres sciences humaines et sociales, est l’une des plus à même de réfléchir à ces questions, de rendre intelligible ce qu’il nous arrive, et ce vers quoi nous pourrions tendre, de façon réaliste et souhaitable.

Quel rôle alors peut jouer l’anthropologie ?

Comprendre les dynamiques humaines au fondement des perturbations environnementales et climatiques.

Comprendre les interactions entre les hommes et leurs milieux, dans une perspective interculturelle.

Mettre en lumière les inégalités sociales et environnementales à l’œuvre, pour y remédier.

Participer à l’élaboration d’alternatives vertueuses et respectueuses des écosystèmes, et du vivant dans son ensemble.

¹ Une « syndémie » caractérise un entrelacement de maladies, de facteurs biologiques et environnementaux qui, par leur synergie, aggravent les conséquences de ces maladies sur une population. Le terme a été développé par Merrill Singer dans le milieu des années 1990 (wikipédia). Pourquoi la pandémie du Covid 19 en serait-elle une ? Parce que, comme le déclare l’historien Jérome Baschet, elle est à la fois une zoonose, dont les symptômes sont aggravés par les maladies chroniques dites « de civilisation », et sa propagation est accélérée par la pollution (+ 15%) : France Culture, « La Grande Table des Idées », le 23-03-2021

  • De l’habiter à l’habitation : où il est question d’architecture et d’urbanisme

« Loger » n’est pas « habiter », nous dit Heidegger. Habiter est un acte essentiel de l’être humain qui transcende celui de loger, et traduit la façon dont nous sommes présents au monde… et pourtant, il semblerait que « faire son logis » d’un lieu, choisi ou fortuit, désiré ou imposé, est l’une des conditions intemporelles qui permet précisément d’habiter le monde. Nous sommes incontestablement des êtres soumis à l’espace, et le lieu nous façonne autant que nous ne façonnons. Dans ce processus, l’habitat occupe une place centrale.

« L’architecture, c’est l’art du lieu » Christian Norberg-Schulz (architecte norvégien)

L’ambition de Theïa Lab est ainsi de déployer une façon de penser et de créer l’habitat en adéquation avec des valeurs humaines et environnementales, de manière incarnée et sensible. Non seulement concilier les innovations techniques, architecturales et énergétiques avec l’innovation sociale, mais bien plus encore, les rendre indissociables, en plaçant l’humain et son environnement au centre de toute innovation, de toute nouvelle expérimentation dans la façon de concevoir les espaces et les territoires.

« L’homme habite en poète » (Hölderlin)

« (…) certains types d’organisation de l’espace, en particulier les unités urbaines neuves, désigneraient exclusivement la fonction du « réel » et non celle de l’imaginaire, appauvrissant ou scotomisant ainsi le rapport émotionnel et symbolique aux espaces habités ». « (…) mais une fonction essentielle de la demeure, de l’habitable, n’est-elle pas justement d’étayer l’existence ? L’exigence majeure qui s’exprime à son propos est bien une exigence de soins, d’attention : la demande que l’espace soit attentif aux soins de la vie » (Jacqueline Palmade).

Ainsi l’anthropologie prête attention à la mémoire des lieux, aux territoires vécus, aux récits de vie des habitants, passés ou présents. Elle dessine une cartographie affective des espaces habités, tout autant que des circulations, des parcours, comme autant de lignes qui tissent l’identité des individus (Tim Ingold, « Une brève histoire des lignes », 2011).

Dans ce domaine, qui constitue l’un de nos cœurs de métier, nous vous proposons de lire la proposition de charte que nous avons conçue avec les deux architectes, Jean de Giacinto et Matthieu Béchaux, des Glacières Architecture à Bordeaux : Note d’intention, pour une rencontre originale entre Architecture et Anthropologie.

… Etre privé d’habitation : Où il est question du Hobbo, du Homeless, du Sans-Abri… et du droit éthique au logement.

Que ce soit les sans-domicile-fixe, que les villes françaises connaissent de longue date, ou les migrants sans abri, en attente d’un statut de réfugié ou réduits à celui en creux de « sans-papiers », Theïa Lab prête attention à la question de la privation de logement aujourd’hui, y compris à l’état minimal de refuge. Cette question intéresse aussi bien les politiques publiques que le droit ou les droits humains, l’urbanisme ou l’architecture.

La privation de logement ou le mal logement, ainsi que l’action des politiques publiques qui viennent tenter d’y remédier, intéressent au plus haut point Theïa Lab ; car s’il ne suffit pas de disposer d’une habitation pour « habiter », il est en revanche éminemment difficile d’« habiter le monde » sans jouir d’une habitation à soi, même provisoire. Le confort et la sécurité qu’offrent un logement sont un droit inaliénable, et la question du sans-abri se révèle être un enjeu essentiel de nos sociétés contemporaines.

Lien utile : https://www.vie-publique.fr/eclairage/20147-politique-du-logement-social-chronologie

  • Si loins, si proches : cohabiter avec l’Autre. Où il est question de l’altérité, et de vivre ensemble.

Habiter, c’est aussi cohabiter entre êtres humains. Nous en revenons alors à la question fondamentale de l’anthropologie : qui est l’autre, quels sont les échanges entre l’autre et le semblable, et de façon plus contemporaine : comment vivre ensemble quand l’altérité est partout, y compris tout près de moi ? L’anthropologie observe, rencontre, divulgue la possibilité d’une rencontre avec cet « autre », si loin si proche. C’est par une anthropologie immersive, attentive, relationnelle, que nous proposons de comprendre l’altérité sous toutes ses formes, pour pouvoir vivre ensemble. Car si le sociologue G. Simmel définissait le citoyen par cette capacité à évoluer auprès de l’autre dans le respect d’une « mutuelle étrangeté », il est encore bien plus souhaitable de développer la capacité (et le goût) de s’ouvrir à l’autre, et de véritablement cohabiter avec lui dans la rencontre et le partage.

Depuis des décennies, nous parlons d’interculturalité, mais sa réelle mise en œuvre engage bien plus qu’une simple juxtaposition de cultures dans un même espace, souvent urbain. L’enjeu est de pénétrer l’univers de l’autre au point d’en être changé, et de le changer. La rencontre peut être individuelle, intime, ou bien collective, sociale. Elle peut être rationnelle, ou sensorielle, sensible. Elle peut se produire dans les espaces privés, intimes, mais ce sont bien souvent les espaces publics qui la suscitent : la rue, la place, la salle de concert, l’école, le centre d’animation, le lieu de travail, etc. Tous ces lieux, tous ces moments sont à penser, à aménager de manière à ce que la rencontre avec l’autre, autant qu’avec soi-même puisse se faire. Car finalement, n’est-ce pas en acceptant d’être altéré et affecté par l’autre que la rencontre avec soi-même peut se produire ? Les deux nous paraissent étroitement liés…

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